samedi 28 juillet 2018

L'heure Espagnole

Quand on parcourt les petites routes en quête de ressourcement, la tentation est grande de devenir un voyageur solitaire. On peut facilement devenir ce contemplatif des hauts sommets ou ce rouleur infatigable se nourrissant de silence et d'émerveillement.
C'est d'ailleurs précisément mon cas. J'aime pouvoir partir quand l'envie me chante - si bien sûr j'en ai la possibilité - et prendre au hasard les routes de ma région. (cf "Petites joies impromptues").
Cette liberté m'est d'autant plus chère que je m'arrête souvent dès qu'une vue ou une perspective se prête selon moi à une jolie photo.
Comme il est salutaire de se retrouver après avoir payé le tribu des convenances sociales, il peut également être riche de vivre sa passion avec ses semblables.
Il est vrai que rouler à plusieurs n'est pas chose aisée. C'est quelque part une privation de sa liberté,  on ne peut mettre les voiles à n'importe quelle l'heure et selon son propre itinéraire. Il faut au contraire s'accorder avec les affinités et les habitudes de l'autre. C'est toute la chimie des relations humaines.
Accepter ce sacrifice c'est s'ouvrir à toute la richesse de l'autre et partager la sienne.
Aussi, de manière tout à fait inédite, la balade dont je vais faire le récit a été faite en duo avec Didier, un motard de ma région rencontré récemment, gros rouleur après l'Eternel, enfourchant une Bullet Classic noire.
Il sillonne les routes des Pyrénées avec assiduité et constance. Plus de 24000 kms en presque 2 ans sur sa dernière monture, avec un état de service impressionnant en tant que motard!
Nous nous sommes donc rapidement accordés sur la destination et l'itinéraire à emprunter ce vendredi.
Sous un ciel maussade, nous avons entrepris une incursion du coté du Pays Basque Espagnol en bifurquant depuis Saint Jean Pied de Port.
Par l'itinéraire le plus rapide, nous avons atteint Saint Jean Pied de Port vers la fin de la matinée avant de prendre la direction du sud, route de Pampelune avec passage au Col de Ronceveaux.
Après une route délicieusement vironneuse à se croire comme une danseuse étoile dans le Lac des cygnes car les virage et son impeccable tracé vous invitaient à vous pencher de droite à gauche , nous avons été accueilli par un paysage de type Méditerranéen, avec des Pins, des cigales et une chaleur digne d'un midi de la France.
Une pause sandwish à Eugui avec son lac artificiel et la route était reprise le long du rio dans une forêt de haute futaie avec des rayons filtrant à travers les arbres.
Remontée vers la France sur une route qui monte et qui descend, curieusement vide de monde car l'endroit offre de multiples départs de randonnées à travers les bois.
Sortie des bois pour atteindre la Vallées des Aldudes en plein Pays Basque côté Français. Ses vallons joyeux et ses maisons blanches qui nous donnent envie de faire escale. Les Basques sont vraiment un beau et grand peuple, haut en couleurs, avec leur traditions chevillées au corps. Nous roulons au passage de fromageries et de fermes proposant des spécialités locales.
Mais d'autres sommets nous attendent alors que nous traversons Saint Etienne de Baigorry, Irulegi puis à nouveau Saint Jean Pied de Port où nous faisons halte pour une pause salutaire. Coup de pompe en ce qui me concerne à 15h30. Je prends un coca et de quoi me restaurer. Tous ces virons pris à un rythme soutenu m'ont donné le tournis. Et puis les kilomètres de son enchaînés.
Didier me propose de faire l'ascension d'Iraty, 1 heure de route et pas des moindres. Je l'avais déjà prise en début d'année alors que la neige y était encore présente, par un froid glacial (lire "En route vers Iraty!").
Elle allait une fois de plus m'accueil dignement. Départ de l'équipée.
Après une montée aérienne avec son défilé de montagnes et ses mille et un virons en épingle, la grimpette nous conduit vers une replat vallonné et vert comme un causse ou un haut plateau en Mongolie.
L'ascension est un péplum, vous côtoyez le Saint des Saints, un écrin de splendeur, entourés par des géants qui vous dominent. Les volutes monstrueux des nuages et les brumes y sont pour beaucoup. Ils donnent du modelé au paysage, comme pour lui conférer une dimension supplémentaire. Le bleu profond du ciel fait écho au vert tendre des prairies de montagne.






Après le Col d'Iraty nous nous retrouvons un peu perdu dans les directions avant qu'un motard du cru, un pur Basque chevauchant une moto tout terrain nous remette sur le droit chemin du Chalet d'Iraty où, dans un brouillard de plus en plus épais, nous ferons escale pour un café.
Quel contraste dans ce tour au mille couleurs. Après les pins de cette Espagne rougeoyante, voici les brumes septentrionales des hauts sommets d'Iraty qui nous replongent prématurément dans la basse saison.
Ce brouillard ne fera que s'épaissir au point de masquer toute visibilité à plus de cinq mètres à la descente alors que la pente est raide, l'enrobé dégradé...et les troupeaux de montons et de vaches n'hésitent pas à élire domicile au beau milieu de la route. Notre descente les laissent d'ailleurs d'une indifférence magistrale. Elles nous considèrent d'un air placide et imperturbable au point que le klaxon et le poum-poum du mono parviennent à peine à les déloger de leur domaine. Tout en nous méfiant de leurs réactions imprévisibles, surtout en présence de veaux, nous abordons la descente avec prudence.
Retour dans la vallée d'Aspe, par Larrau, Montaury, Féas, puis Oloron Sainte Marie.
Ce tour qui s'annonçait impressionnant, a tenu ses promesses. Retour vanné, repu de belles images, d'énormes sensations au guidon de cette merveilleuse moto et ravi d'avoir vécu cette tranche de vie avec mon compagnon de route! A refaire.

2 commentaires:

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  2. Superbe récit!! Le bonjour à Didier en espérant avoir la chance de rouler avec vous un de ces jours!!!

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